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Les Chroniques de Cybérie
21 mars 2000

© Les Éditions Cybérie inc.

21 mars 2000

Salutations à tous les Cybériens et Cybériennes!

Cette Chronique n'est optimisée ni pour Netscape, ni pour Internet Explorer, elle l'est pour ses lecteurs et lectrices.

Cette semaine...

Budget québécois et Internet : priorités nouvelles
Votre opinion des fournisseurs : des surprises
Le mirage du multimédia
«Bienvenue dans une start-down» : le retour du rafaleur
Le philanthrope mauvais comptable
Chapitre québécois de l'Internet Society
En bref...
Beau détour

 Budget québécois et Internet : priorités nouvelles
Mardi dernier, le ministre québécois des Finances, Bernard Landry, déposait le budget de l'administration publique pour l'exercice 2000/2001, et parmi les mesures annoncées figure un engagement de 340 millions de dollars pour «faire du Québec une société branchée» (document annexe au budget, en format PDF).  Vendredi, le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux services gouvernementaux, David Cliche, rencontrait la presse pour expliquer les engagements du gouvernement.

Mesure d'incitation pour que les petites et moyennes entreprises (PME) prennent le virage du commerce électronique, un nouveau crédit d'impôt remboursable égal à 40 % des dépenses engagées pour la mise sur pied de sites transactionnels.  L'objectif du gouvernement : inciter 10 000 PME à se prévaloir de cette mesure.  On prévoit aussi stimuler l'implantation de réseaux de fibre optique en région en offrant un taux d'amortissement accéléré de 125 % aux entreprises responsables de ce déploiement, une mesure dont le coût est estimé à 15 millions de dollars.  Une somme de 45 millions sur trois ans ira à la modernisation de l'offre des services gouvernementaux sur Internet, ce qui comprend la mise en place d'infrastructures de sécurité requises pour assurer la confidentialité des transactions entre le gouvernement et les citoyens ou les entreprises. 

Mais la mesure qui retient principalement l'attention est l'affectation de 121,5 millions de dollars sur trois ans à un programme d'incitation au branchement pour les ménages.  Le gouvernement espère que cette mesure permettra de réduire l'écart (on évite toujours de parler de «retard») qui sépare le Québec et ses partenaires nord-américains en matière de branchement, d'atténuer l'ampleur du clivage entre branchés et non branchés, de développer des compétences chez les jeunes et, enfin, de «lever l'hypothèque financière» qui, jusque là, constituait pour les familles visées un frein à l'appropriation des nouvelles technologies.

Le programme relèvera du ministère de l'Industrie et du Commerce, entrera en vigueur le 1er mai 2000 et s'adressera aux ménages qui reçoivent une allocation familiale versée par la Régie des rentes du Québec, donc aux ménages avec enfants de moins de 18 ans disposant d'un revenu total inférieur à 53 000 $, soit 200 000 familles.  L'aide gouvernementale couvrira à hauteur de 75 % deux types de forfaits, soit l'accès à Internet, ou l'accès à Internet avec ordinateur «multimédia». 

Prenant pour exemple un forfait d'accès mensuel simple à 22 $, la subvention gouvernementale sera de 16,50 $ (maximum de 200 $ par année), et le coût pour le ménage de 5,50 $.  Pour un forfait d'accès avec un contrat de location/achat d'un ordinateur, dont le coût mensuel serait de 50 $, la subvention gouvernementale sera de 37,50 $ par mois (maximum de 450 $ par année) et le coût pour le ménage de 12,50 $ par mois.  À la fin du contrat de service, le ménage pourrait conserver sans frais l'ordinateur. 

Précisons que cette subvention sera versée directement aux fournisseurs ou prestataires, ce qui évitera aux ménages de défrayer la totalité des coûts puis de devoir demander un remboursement.  Les fournisseurs qui souhaitent participer au programme devront être accrédités par le gouvernement et se conformer à certaines exigences relatives au prix, à la qualité du service, à la puissance de l'ordinateur et au nombre d'heures d'accès.

Depuis longtemps, la politique gouvernementale en matière de développement d'Internet consistait à agir sur l'offre de contenus et de services en espérant qu'il y ait un effet sur la demande de branchement.  L'incitation au branchement des ménages reflète-t-elle un changement de philosophie? Non, de répondre le ministre, tout se fait dans la continuité, il s'agit seulement d'un recentrage, de «priorités nouvelles».

Rendons à Bernard (Landry) ce qui est à Bernard, l'ensemble de son budget est généreux pour le contribuable, et les mesures d'incitation au branchement ne font pas exception.  Cependant, bon nombre de questions sont restées sans réponse lors de la rencontre avec le ministre Cliche.

Concernant le processus d'accréditation des fournisseurs, le ministre nous a dit qu'on est en train de mûrir la formule, mais a laissé échapper qu'ils pourraient être «quatre, cinq ou six» à être accrédités.  Dans une telle perspective, on pourrait d'ores et déjà déduire que les petits fournisseurs régionaux seront exclus du processus d'accréditation, ce qui serait bien dommage.  Il existe une douzaine de fournisseurs qui offrent le service dans plus d'une région, mais les «petits régionaux» sont plus d'une soixantaine.  Dans bien des cas, ils ont été des précurseurs et ont contribué à déployer le réseau en région alors que les «gros» fournisseurs dédaignaient les petits marchés.  Or, pour citer M.  Landry, il faudrait bien songer à un «juste retour des choses».

En outre, se serait une grave erreur de croire que la taille d'un fournisseur ou la réputation de son infrastructure sont des gages de qualité de service ou d'autres critères qui seraient retenus pour l'accréditation.  Les résultats de l'enquête sur le degré de satisfaction à l'endroit des fournisseurs à laquelle nous avons participé (voir plus bas) sont à cet égard assez révélateurs.

La composition des forfaits reste aussi à établir, mais pourrait-elle comprendre un volet formation visant à optimiser l'investissement que l'État se prépare à faire avec les 200 000 ménages visés par le programme? La documentation n'en fait aucune mention.

Également, la question des contenus se pose.  Le créneau de revenu des ménages visés est de 53 000 $ ou moins.  Que l'on parle d'un ou de deux salaires, avec le fardeau fiscal le plus lourd en Amérique du Nord, on parle de ménages à revenu modeste.  La corrélation revenu/accès Internet a de tout temps été dominante et le gouvernement québécois vise par son programme d'incitation à l'accès à combler le fossé numérique basé sur le revenu (digital divide, fracture numérique, clivage), un «clivage qui rejaillit sur les enfants» selon le gouvernement. 

La semaine dernière, le Children's Partnership, organisme basé à Washington, rendait public les résultats d'une vaste enquête sur les contenus Internet.  Bilan : environ 6 % des sites Web étudiés contiennent de l'information jugée utile ou pratique pour les ménages à revenus modestes, seulement 1 % des sites pouvaient facilement être consultés par des personnes éprouvant des difficultés sur le plan de la lecture.  On peut supposer qu'une étude semblable qui serait menée au Québec ou ailleurs donnerait, pour l'ensemble, des résultats équivalents.

Interrogé sur la question, le ministre nous a dit être confiant que les ressources affectées à l'essor des contenus reflétant la culture et les valeurs privilégiées par le Québec (soutien de 15 millions par année pour trois ans, point 3.1.3 du document cité) pourraient parer à certaines de ces lacunes.  On ne trouve cependant rien de concret à ce jour dans les projets dévoilés par le gouvernement.

Il est certain que l'ensemble des mesures annoncées la semaine dernière ont un énorme potentiel de retombées positives pour la société en général, et pour le secteur Internet.  Le ministre Cliche nous a souvent répété, dans le passé, «On taille dans du neuf.  Ce que nous tentons [avec les nouvelles technologies] n'a jamais été tenté auparavant.» On en convient.  Mais on conviendra aussi de l'importance de prendre des décisions éclairées pour optimiser les effets des marges de manoeuvre durement acquises au cours des dernières années.  Caveat consules.

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 Votre opinion des fournisseurs : des surprises
Publication des résultats du sondage sur l'opinion que vous avez de votre fournisseur Internet (réalisé en ligne avec la collaboration du Journal de Montréal, du Journal de Québec, du quotidien The Gazette, du Guide Internet et des Chroniques de Cybérie).  Des résultats qui dans certains cas surprennent, et qui dans d'autres cas viennent confirmer des intuitions.

Le sondage a été mené en ligne au cours de la deuxième semaine de mars 2000.  Un total de 8 058 questionnaires ont été reçus, desquels 1 237 ont été rejetés (envois multiples, renseignements incomplets), ce qui donne un échantillon de 6 621 répondants. 

En général, les utilisateurs sont satisfaits de leurs fournisseurs en matière d'accès au service et de disponibilité de circuits commutés, de fiabilité du service, de débit de connexion réel, de soutien technique au téléphone en cas de problème.  Là où il y a presque unanimité, c'est sur la facturation du service : plus de 98 % des répondants disent qu'elle est toujours ou souvent conforme au service proposé et à l'utilisation. 

Notre collègue Nelson Dumais, l'instigateur de la consultation, dit avoir reçu des commentaires sur l'interruption de connexions déjà établies.  Précisons ici que, bien souvent, ce sera la communication téléphonique qui sera responsable d'une interruption et non le fournisseur de service.

Au classement, c'est le fournisseur Sprint qui arrive en tête pour le degré de satisfaction des utilisateurs, suivi de Globetrotter, Cogeco, de la catégorie «Varia» (regroupant les «petits» fournisseurs pour lesquels nous avons reçu 100 réponses ou moins), Colba, Total, Vidéotron et Sympatico.  Et ce que l'on pourrait appeler le peloton des fournisseurs n'était pas groupé au fil d'arrivée; les écarts sont sensibles.  Ainsi, Sprint s'est classé premier dans 7 des 9 questions d'appréciation, alors que Sympatico arrivait 2 fois dernier et 3 fois avant dernier pour ces mêmes questions.

Les fournisseurs prennent rarement le temps, toutefois, de faire un travail de sensibilisation de leur clientèle à l'égard de certains risques inhérents au branchement.  À la question «Votre fournisseur vous a-t-il sensibilisé aux questions de sécurité informatique (p.  ex.  la gestion des mots de passe, les pare-feu, etc.)?», 20,22 % des répondants ont dit «Suffisamment» et 21,30 % «Un peu» alors que la majorité (53,19 %) ont répondu «Pas du tout».

Voilà donc des résultats qui pourraient orienter les fournisseurs désireux de bonifier leur service à la clientèle.

Autres constatations : 75,85 % des répondants se branchent plus de 20 heures par mois; les différentes moutures du système d'exploitation Windows dominent (plus de 95 %), le fureteur Windows Internet Explorer aussi (65,37 %), une majorité très «chrétienne» des utilisateurs (70,34 %) se branche à 56K ou moins.

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 Le mirage du multimédia
On nous annonce une première réunion des personnes souhaitant participer à la mise sur pied de l'Association des travailleurs du multimédia du Québec (ATMQ), un dossier dont nous vous parlions en décembre dernier.  La rencontre se tiendra à Montréal le mercredi 22 mars, à 19 heures, à l'Hôtel Gouverneur (Place Dupuis).  D'après le responsable, Berry Farah, il s'agit «d'amener peu à peu l'ATMQ vers un statut plus officiel pour qu'elle devienne plus influente dans l'industrie du multimédia.» On entend défendre des principes de conditions salariales (un salaire minimum en multimédia, une politique de limitation des heures de travail), et de reconnaissance des droits d'auteurs et du statut de travailleur autonome.  Soulignons que pour l'ATMQ, la notion de multimédia recoupe tant les activités en ligne que les productions hors ligne.

Cette tentative de structuration des travailleurs du multimédia intervient alors qu'un débat était lancé la semaine dernière par un dossier du netmag Multimédium sous le thème «Êtes-vous assez bien payé?» signé par Sylvie Pesme et Jean-Sébastien Marsan.  Avec force statistiques officielles, les auteurs ont voulu brosser un tableau des conditions d'emploi dans le secteur des nouvelles technologies de l'information au Canada et aux États-Unis.  Citant des chiffres du Conseil des ressources humaines du logiciel, ils rapportent par exemple qu'au Canada, le salaire d'un spécialiste en conception Web atteindrait (au plus haut de sa catégorie) 79 072 $ CAN, et celui d'un gestionnaire de contenu Web 54 611 $ CAN. 

Tollé dans le Forum du netmag : les «statistiques officielles» ne refléteraient pas la réalité sur le terrain, du moins dans le secteur multimédia, et bon nombre d'intervenants se sont mis en frais de présenter l'envers de la médaille.  Par exemple, un intervenant écrit «je travaillais pour une firme informatique et j'y étais employé pour les taches suivantes : webdesign, graphisme, flash et cgi et je touchais environ 20 000$/an sans avantages sociaux». 

Une autre, directrice de production responsable d'une équipe de 8 à 10 personnes, gère les projets, rencontre les clients, les conseille en solutions Web, fait le suivi auprès des clients et des membres de l'équipe, s'occupe de la scénarisation, de la conception des designs, de la structure, de l'analyse, de la direction artistique, de l'assurance qualité, de la documentation et du suivi avec le client suite à la mise en ligne du projet, en plus de participer également à l'infographie et à l'intégration : «Pour un total de : 33 000 $.  Avantage sociaux : 0.  Heures supplémentaires : 0.» De commenter l'intervenante, «Venez donc faire un tour dans la fameuse Cité du Multimédia pour y cueillir des statistiques propres à l'industrie du multimédia...  j'ai des p'tites nouvelles pour vous! La réalité s'y vit péniblement quotidiennement.»

Et un autre son de cloche dans ce qui commence à être un tintamarre d'insatisfaction : le volet formation.  Le journaliste Jean-Hugues Roy de l'émission Branché a présenté samedi dernier un dossier accablant sur les collèges privés non-subventionnés qui enseignent l'informatique et le multimédia et qui exigent entre 6 000 $ et 18 000 $ pour un programme de formation.  De nous dire Jean-Hugues Roy, «On a vérifié tout ça.  Des professeurs qui apprennent les logiciels au fur et à mesure qu'ils les enseignent, ou qui quittent leur groupe en pleine séance, des labos d'informatique bondés, des écoles cotées au NASDAQ, etc.; en clair, les étudiants n'ont pas du tout l'impression d'en avoir pour leur argent.»

Décidément, tout tourne autour de l'argent.  Des jeunes (et des moins jeunes) paient de fortes sommes (souvent empruntées) pour suivre des programmes n'offrant pas le degré de formation nécessaire pour occuper un emploi.  Si, à tout événement, ils se décrochent un emploi dans le multimédia, ils sont confrontés au problème de faible rémunération cité plus haut.  On pourrait jeter la pierre aux professeurs, mais eux aussi sont sous-payés. 

Et les notes de passage trafiquées? D'après un enseignant interviewé à l'émission, «On m'a même déjà dit carrément, dans le cas d'un étudiant qui avait 50 %, la direction et la haute direction sont venues me voir et ont dit : "cet étudiant-là, il faut qu'il passe" [...] La note de passage étant 60, et ça, c'est simple à comprendre, c'est que le cours qu'il coulait était un prérequis pour la prochaine session.  Donc, s'il coulait son cours, il ne pouvait pas prendre la prochaine session, donc moins d'argent qui rentre.»

On se saurait affirmer que tous les programmes de formation sont nuls ou constituent des arnaques.  Le reportage de Branché mentionne certains exemples d'excellence.  Il faut cependant se rendre à l'évidence et voir que ceux et celles qui projettent de s'inscrire à un programme de formation ont tout intérêt à se renseigner à fond sur les établissements prestataires.

Comme d'habitude, suivant l'émission, l'équipe de Branché publiait sur son site Web la transcription des reportages et un complément d'information.  Samedi et dimanche, les personnes visitant le site ont eu droit à un dossier complet des recherches (entrevues, lettres, messages par courrier électronique) soutenant les faits avancés.  Or, ce complément d'information a été retiré du site Web, lundi, pour être remplacé par une version plus légère.  Le rédacteur en chef de l'émission, Jean-Paul Dubreuil, le réalisateur, Martin Roy, et le journaliste Jean-Hugues Roy, auraient décidé de retirer certains échanges de correspondance et entrevues non diffusées, estimant plus sage de procéder ainsi en raison d'éventuelles poursuites que pourraient intenter les établissements incriminés.

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 «Bienvenue dans une start-down» : le retour du rafaleur
Si l'émission de votre certificat de cybercitoyenneté est postérieure au 23 novembre 1996, ce n'est peut-être que par hasard que vous avez entendu parler de La Rafale, cette zone d'autonomie temporaire (ZAT) sur le Web, un des premiers sites iconoclastes, qu'animait depuis 1995 le rafaleur David Dufresne.  Le 23 novembre 1996, La Rafale s'éteignait, «404 URL Not Found».

Bonne nouvelle, et «Bienvenue dans une start-down», Dufresne (Davduf pour les intimes) est de retour avec un nouveau site, davduf.net.  Entre son emploi (au journal Libération), sa moto, sa fille Juliette, son nouveau site Web, et que sais-je encore, il a eu l'amabilité de répondre à nos questions.

Qu'est-ce qui motive ce retour? «La NetÉconomie! Si, si.  Je ressens le même sentiment d'urgence qu'en 1995, ou tout était à inventer.  Aujourd'hui, le Web marchand est définitivement là.  Il est partout, en France.  Des pubs à n'en plus finir.  Des projets de start-up qui pullulent.  Dans le même temps, des indépendants sont restés (comme rezo.net), ont maintenu la flamme coûte que coûte et voilà, soudainement, le 31 décembre 1999 pour être précis, j'ai eu envie d'apporter ma petite contribution à l'édifice d'un Web alternatif.  Comme en 1995, j'ai l'impression que des choses importantes se jouent en ce moment.  Il y a le même bordel, le même engouement en 2000 qu'il y a 5 ans.  Donc, il y a des places à prendre, à la marge [...] je crois que l'effervescence actuelle est le signe paradoxal qu'il y a peut-être une nouvelle carte à jouer, maintenant, et à nouveau, pour le Web indépendant.  Les positions de chacun (indé, marchand) sont définitivement claires.»

Il y aurait donc de nouveaux modèles? «Il en est du Web comme des logiciels libres, en fait.  Je m'étais planté il y a 5 ans, en croyant que tout allait être bouffé par Microsoft et Netscape.  Depuis, il y a eu Linux.  Pourquoi n'y aurait-il pas l'équivalent de Linux en termes de contenu? Voila l'enjeu du Web à mes yeux.  Et le plus drôle, c'est que nous pouvons y arriver : les marchands du Web n'ont rien à dire, nous si.  C'est notre force : soyons nous mêmes et tout ira bien.»

Tu es seul dans cette équipée? «Oui et non.  Oui, sur l'aspect technique et maintenance du site.  Mais j'espère vivement que davduf.net incitera tôt ou tard des gens à m'écrire, à envoyer des textes, etc.  Rien de bien original, donc.  Cela dit, j'appelle de mes voeux un regroupement à terme des forces indépendantes.  Dans mon esprit, le Portail des Copains serait une formidable plate-forme (et un possible cheval de Troie) pour le Web indépendant si nous nous mettions à le nourrir réellement, par des textes originaux, etc.  J'ignore si cela est à l'ordre du jour.  Mais ce serait bien...»

Et le patrimoine de La Rafale, c'est pour l'histoire? «C'est tout à la fois un clin d'oeil aux amis et à la petite histoire, mais c'est surtout une sorte de repère pour moi.  Une façon de me rappeler d'où je viens, comme un garde fou.  Cela dit, il serait triste de verser dans la nostalgie.  Davduf.net n'est pas La Rafale.  Ni même une Rafale bis.  La Rafale est morte en 1996, après un an de mitraillage.  Et on ne meurt qu'une fois, n'est ce pas.  Donc, davduf.net s'inscrit dans une continuité, mais dans le même temps ce site évolue dans un univers qui n'a plus grand chose à voir avec celui qui entourait La rafale.  Les choses ont changé, il serait idiot et frustrant et étouffant de faire comme si de rien n'était.»

En bien, Davduf, bienvenue de nouveau sur le Web.

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 Le philanthrope mauvais comptable
La nouvelle avait tout pour séduire les médias.  Michael Saylor, président fondateur de la société MicroStrategy (fabricant de logiciels d'extraction de données), annonçait qu'il allait jeter les bases de l'université du futur.  Saylor, milliardaire «point com» de 35 ans, entendait injecter 100 millions de dollars de ses avoirs personnels pour monter une université virtuelle.  Les sommités de ce monde se rendraient dans des studios de télévision pour dispenser bénévolement des cours et pratiquer le tutorat personnalisé par l'intermédiaire d'Internet.  Quiconque pourrait suivre ces cours gratuitement et obtenir des diplômes.  Une société sans but lucratif serait mise sur pied pour gérer les opérations, les programmes, la certification, et Saylor avait déjà versé sa contribution de 100 millions de dollars dans un compte en fiducie.

USA Today rapportait que le milieu de l'enseignement entretenait des réserves à l'égard du projet d'université virtuelle de Saylor, soulignant que ce qui fait la richesse des universités (contacts personnels, milieu physique, échanges) serait difficile à reproduire en virtuel.

Voici que MicroStrategy défraie de nouveau la chronique, mais cette fois dans les pages financières.  Lundi, 20 mars, le titre de MicroStrategy en bourse chutait subitement de 62 %, perdant 140 $ de sa valeur et diminuant ainsi l'actif boursier de MicroStrategy de 11 milliards de dollars.  La raison : les profits rapportés pour les deux derniers exercices financiers seraient en fait des pertes.  Saylor déclarait que la société «modifiait les pratiques comptables servant à établir ce qu'est un profit et ce qu'est une perte pour se conformer à des pratiques plus généralement reconnues.»

Pourtant, la comptabilité créative de MicroStrategy avait reçu l'aval des vérificateurs de PricewaterhouseCoopers LLP.  Mais en décembre dernier, la Securities and Exchange Commission (organisme de réglementation des pratiques financières des sociétés) émettait des critères plus stricts pour comptabiliser les ventes (et donc les profits inscrits aux livres) des sociétés de la nouvelle économie.  Ces critères portent sur la preuve qu'un contrat de vente existe, que les produits et services ont été livrés, que le prix a été convenu ou puisse être déterminé, et que le paiement soit assuré.

À l'évidence, MicroStrategy n'aurait pas respecté ces critères, d'où la transformation de profits virtuels en pertes réelles. 

On ignore si l'idée d'université virtuelle sera maintenue et, le cas échéant, si on pourra y suivre de réels cours de comptabilité.

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 Chapitre québécois de l'Internet Society
Après le très silencieux chapitre canadien créé en mai 1997, et le chapitre torontois accrédité en février 1999, on apprenait vendredi dernier que des démarches étaient en cours pour mettre sur pied une section québécoise de l'Internet Society (ISOC) qui portera le nom d'Association ISOC-Québec.  L'ISOC est l'organisme international sans but lucratif qui regroupe des professionnels de tous les domaines liés au réseau.  L'organisme veille à l'établissement de normes techniques et entretient des programmes de formation, de sensibilisation et d'élaboration de politiques.  L'ISOC regroupe 150 organismes et 8 600 particuliers issus de 170 pays.  La charte de l'ISOC prévoit la possibilité de créer des chapitres locaux ou nationaux de l'organisme afin de mieux servir les intérêts spécifiques à une région donnée.  Il existe présentement 52 chapitres locaux. 

L'idée n'est pas nouvelle et avait fait l'objet de discussions lors de la tenue à Montréal, à l'été 1996, des assises annuelles de l'ISOC.  Un nom de domaine avait même été préalablement retenu en février 1996 par les promoteurs du projet (isoc.qc.ca, ne répond plus) qui étaient alors regroupés sous le nom d'Association des internautes québécois (AIQ).  Puis, le 17 octobre de la même année, les responsables de l'AIQ présentaient un mémoire aux audiences publiques de la Commission de la culture sur les enjeux du développement de l'inforoute québécoise.  À cette occasion, M. Marc Blanchet, fondateur et membre du conseil de l'AIQ, avait déclaré «L'association a déjà obtenu un statut de chapitre provisoire de l'Internet Society, l'organisme mondial assurant les orientations d'Internet.  Dès que l'incorporation de l'association sera conclue, elle demandera le statut officiel de chapitre, devenant ainsi l'antenne québécoise de l'Internet Society».  On ne connaît pas trop la suite des événements, mais le chapitre québécois de l'ISOC ne vit pas le jour.

Les présentes démarches sont menées par M. Réjean Roy, analyste-conseil, qui déclare avoir déjà recueilli l'appui de 25 personnes (dont celui de M. Blanchet), exigence minimale posée par l'ISOC pour l'accréditation d'un chapitre local.  Selon M. Roy, la création d'une section québécoise de l'ISOC s'imposait : «ISOC-Québec permettra de mieux représenter les intérêts économiques, sociaux, culturels et linguistiques des citoyens, des consommateurs et des entreprises du Québec au sein du plus influent regroupement mondial d'utilisateurs d'Internet, de même qu'auprès des gouvernements québécois et canadien.»

Toute personne intéressée à se joindre à la future section québécoise de l'ISOC est invitée à consulter la page Web du projet (qui comprend en annexe un extrait du projet de statuts de l'Association ISOC-Québec) et à communiquer avec le responsable par courrier électronique.

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 En bref...
Revenons encore une fois sur l'affaire Chris Nolan, cette journaliste du Mercury News suspendue par la direction du journal pour avoir encaissé plusieurs milliers de dollars en profits découlant d'une transaction boursière.  L'affaire a fait du bruit, et continue de susciter des remous, mais cette fois c'est Chris Nolan elle-même qui profite de l'occasion offerte par le netmag Salon pour faire le point sur l'affaire.  Dans un billet intitulé «Why I'm still scribbling for a living» (Pourquoi je gribouille toujours pour gagner ma vie), Nolan trouve qu'elle a été sévèrement jugée par le milieu journalistique et par son journal qui l'aurait assimilée à une «pute des titres Internet de fin de millénaire».  Selon elle, sa chronique de potins la mettait à l'abri des conflits d'intérêts car elle n'écrivait pas sur l'économie, la bourse ou les transactions d'actions, et ne pouvait donc influencer la performance de la société dont elle détenait des titres.  Elle prétend avoir effectué la transaction pour observer de l'intérieur le phénomène de la «loterie boursière» (elle a d'ailleurs écrit un article dans le magazine Fortune sur son expérience).  Et si elle a quitté le Mercury News et continue a rédiger une chronique à potins dans le New York Post, plutôt que de courir les placements initiaux de titres, c'est qu'elle adore le métier de l'écriture.  Nolan n'est pas tendre pour le milieu journalistique californien, «rempli de gens qui interviewent des personnes pour qui ils aimeraient travailler».  On la comprend, cette attitude dépasse les frontières de la Californie.  Et pourquoi cet amour du métier? «Bien sûr, dans ce travail, on raconte les histoires des autres.  Mais si on est suffisamment habile, on impose son style, et on fait passer ses opinions.»

Un autre cas de deux poids deux mesures pour les journalistes de médias en ligne par rapport aux collègues de la presse traditionnelle.  Le USA Today rapporte que la National Collegiate Athletic Association (Association nationale de l'athlétisme collégial - NCAA) a décidé de n'accréditer aucun des journalistes sportifs travaillant pour des médias en ligne à l'occasion d'un important tournoi de basketball, le Final Four.  Jim Marchiony, un des responsables de la NCAA, estime qu'il y a un nombre limité de places et qu'il est impossible de distinguer entre les sites Web «légitimes et non légitimes», rien de moins.  Cette décision touche donc les journalistes des ligues majeures de la couverture de l'actualité sportive en ligne comme ESPN, FoxSports et SportsLine.  On fait exception pour les journalistes du site Web de la chaîne CBS qui est le diffuseur officiel de l'événement, et ceux du site Web de la NCAA, OSBL qui remplit néanmoins ses pages de bandeaux publicitaires. 

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 Beau détour
On apprend ces jours-ci que le magazine américain LIFE cessera d'être publié en mai.  Propriété de Time Warner (bientôt AOL Time Warner), ce grand classique de l'édition illustrée serait victime de la hausse des coûts de production et de la stagnation du tirage dans un environnement médiatique très concurrentiel.  Un beau détour un peu particulier, cette semaine, sur le site de LIFE où on trouve un grand nombre de photos qui, au cours de ses 64 ans d'existence, ont remué le monde.

Et sur ce, nous vous souhaitons à tous et toutes une excellente semaine.

Écrire à Jean-Pierre Cloutier


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