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Le 6 mai 1998. |
Salutations à tous les Cybériens et Cybériennes!
Cette Chronique n'est optimisée ni pour Netscape, ni pour Internet Explorer, elle l'est pour ses lecteurs et lectrices.
Cette semaine...
- Soussy.com, chapitre deux
- Alexandrie ne répond plus
- L'AMI a-t-il trébuché sur le réseau?
- Encyclopédie des temps modernes
- Lettres de créance de la presse en ligne
- Lectures rapides
- MIIM 1998
- En bref
- Beau détour
Soussy.com, chapitre deux
Dans notre chronique du 23 avril dernier, nous exposions la position des requérants dans ce qu'il est désormais convenu d'appeler l'«affaire Soussy.Com», un litige porté devant les tribunaux ayant pour objet central le contrôle de la principale régie publicitaire de sites Web au Québec. Dans sa plus récente édition, le NetMag «Les clés du commerce électronique», sous la plume de Vallier Lapierre, nous livre le deuxième chapitre de l'affaire, soit la position du fondateur de cette régie publicitaire, Olivier Soussy. Manigances alléguées des requérants, aveu de confiance aveugle de l'intimé et affidavits d'appui de tiers concernés constituent les points forts des arguments présentés par M. Soussy.
Quelques jours avant, le juge James T. Kennedy avait conclu que «la demande de destituer l'intimé Olivier Soussy à titre d'officier-administrateur de la mise-en-cause ne peut pas être accordée; tout ce qui peut être accordé est de suspendre les pouvoirs de monsieur Soussy à titre d'officier et d'administrateur jusqu'à un autre jugement de cette Cour» pouvait-on lire dans un autre NetMag, Mémento. Prochain rendez-vous des disciples de Thémis, le 7 mai prochain.
Mais revenons à l'analyse de Vallier Lapierre qui souligne, à notre avis, deux questions importantes. La première, c'est de leur propre reconnaissance la marge de manoeuvre réduite de certains cybermédias (représentés par Soussy.Com, où dont une partie du capital est détenu par les requérants) dans leur traitement de l'affaire. Le droit (sinon le devoir) à informer le public d'une cause importante pour l'industrie est donc subjugué aux intérêts du capital actions, et selon Lapierre «Il démontre en même temps les risques encourus par les producteurs de contenus à s'en remettre à des bailleurs de fonds externes pour assurer leur survie». La seconde, c'est que l'affaire «fragilise le marché naissant de la publicité sur Internet, alors même qu'un début de concertation des principaux intervenants tente de susciter l'intérêt des annonceurs».
On ne peut qu'avaliser la conclusion de notre collègue, «En bout de ligne, la réaction viscérale des acteurs de l'inforoute au Québec, qu'ils soient impliqués ou non dans cet imbroglio, est unanime: "On s'en serait bien passé."»
Alexandrie ne répond plus
Le site de la bibliothèque virtuelle Alexandrie.Com qui se voulait le carrefour de toutes les ressources textuelles numérisées disponibles en français ne répond plus. «Le serveur ne possède pas d'entrée DNS» nous informe notre fureteur. Recherche dans les sites référence des noms de domaine: les coordonnées des responsables ne sont plus valides, on indique que le nom de domaine Alexandrie.Com est disponible. Tentative infructueuse par courrier électronique :
550 <admin@alexandrie.com>... Host unknown (Name server: alexandrie.com: host not found).
Fondée par Ptolémée I Sôter, la Grande Bibliothèque du Palais Royal d'Alexandrie renfermait à son apogée, avant même l'avènement du papier fibre, 490 000 rouleaux de textes, une masse incroyable d'écrits pour l'époque. Détruite une première fois dans un incendie lorsque César prit la ville, elle le fut à nouveau en 390 dans les luttes des Païens contre les Chrétiens. Les derniers restes auraient été anéantis en 641 sur l'ordre du calife Omar.
L'incarnation virtuelle d'Alexandrie proposait des textes numérisés d'auteurs classiques répartis en divers «salons», recensait les projets actuels et à venir sur le développement des bibliothèques virtuelles, rendait compte des informations sur les nouvelles expériences d'écriture et sur l'édition électronique, et offrait quantité de liens utiles aux bibliophiles.
Disparition regrettée car l'expérience n'était pas sans intérêt. Actualisation forcée pour les webmestres des pages où figurait la référence d'adresse Alexandrie.Com, AltaVista en dénombre environ un millier. Enfin, si vous apprenez qu'Alexandrie renaît de ses cendres, nous vous saurions gré de nous le signaler pour que nous en informions notre aimable lectorat.
L'AMI a-t-il trébuché sur le réseau?
L'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI dont on pourrait bien se passer, a été relégué aux comités de l'OCDE et fera de nouveau l'objet de discussions l'automne prochain. «Les Ministres donnent instruction aux négociateurs de poursuivre leurs travaux en vue de conclure l'AMI en temps utile et de rechercher une large participation à l'accord» lisait-on dans un communiqué en date du 28 avril. Qu'est-ce que l'AMI? «Imaginez un traité de commerce autorisant les entreprises multinationales et les investisseurs à poursuivre directement en justice les gouvernements pour obtenir des dommages et intérêts en compensation de toute politique ou action publique qui aurait pour effet de diminuer leurs profits». C'est ainsi que Lori Wallach résumait la situation en février de cette année dans Le Monde diplomatique.
Si le report en comités de l'AMI en a satisfait plus d'un, bien qu'il ne faille pas encore avoir la victoire trop facile, certains observateurs estiment que la campagne de mobilisation contre l'Accord qui s'est déroulée sur le réseau a été un des principaux facteurs de sa déconvenue. C'est ce que prétend, du moins, Madelaine Drohan dans les pages du Globe and Mail, théorie reprise dans les pages éditoriales du quotidien The Montreal Gazette. En fait, des groupes de plusieurs pays s'opposant à l'AMI auraient utilisé le réseau pour mettre en commun leurs informations, coordonner leurs stratégies, et sensibiliser le public aux effet estimés pervers de l'Accord. Premier exercice de démocratie mondialisée, selon un des cadres de l'OCDE.
Mais attention, l'affaire n'est pas finie. Le Canadien Donald Johnston, premier secrétaire général de l'OCDE qui ne soit pas Européen, compte bien raviver l'AMI, à moins que le dossier ne soit porté devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ce qui aurait pour effet d'entraîner les économies en voie de développement dans le sillage de l'Accord. Détails dans le Ottawa Citizen. À suivre.
Encyclopédie des temps modernes
Publiée en trois livraisons successives dans le mensuel phare Wired, l'Encyclopédie de la nouvelle économie (ENE), du moins les deux premières sections car la troisième sera disponible plus tard ce mois-ci, ont été versées sur le Web.
Préparée par John Browning et Spencer Reiss, gracieuseté d'une grande firme conseil américaine, l'ENE recense les mots/concepts clés auxquels il faudra se faire dans cette nouvelle économie, d'«adhocracy» (adhocratie, organisation sans structures) à «zero sum» (somme zéro, ce que la nouvelle économie n'est pas, selon les auteurs). Bon nombre de néologismes, il va sans dire, comme la coopétition (collaboration entre concurrents) et la disintermédiation (élimination des intermédiaires). Mais aussi des concepts formulés de manière intéressante, novatrice, voire séduisante comme l'«apprentissage juste-à-temps» (just-in-time learning) qui suit le modèle industriel de l'approvisionnement juste-à-temps (just-in-time delivery). On se débarrasse des inventaires intellectuels lourds et coûteux et on commande des outils et des matériaux du savoir et de la connaissance qui seront livrés juste-à-temps pour produire des biens et services dans une économie de l'information.
Le concept de «chaîne alimentaire de l'information» a aussi retenu notre attention. Digérés par le cerveau humain, les données éparses sont transformées en information, en messages qui modifient notre interprétation du monde. La connaissance se situe une étape plus loin, soit dans la compréhension intégrée de ces messages et de leur signification commune qui donne une vision du monde. La connaissance est donc ce qui donne une valeur à l'information, et la différence entre inforiches et infopauvres résiderait dans la capacité de déterminer l'information qui nous est nécessaire, et surtout la manière de l'utiliser.
L'Encyclopédie de la nouvelle économie ne plaira pas à tout le monde, à commencer par les économistes de profession qui y verront des thèses farfelues sans aucun fondement scientifique. Notons que les auteurs ne sont pas de la confrérie des économistes, mais bien des journalistes à l'emploi de Wired.
L'ENE s'inscrit dans la lignée de «New Rules for the New Economy: Twelve dependable principles for thriving in a turbulent world» de Kevin Kelly, ouvrage dont nous vous parlions en septembre dernier, un traité que nous estimons magistral sur les bouleversements profonds que subissent nos économies. Des lectures qui ont au moins l'avantage de ne pas laisser indifférents.
Toujours concernant Wired, les rumeurs de la vente du périodique se font de plus en plus persistantes et, si elles se confirment, sonneraient le glas pour l'entreprise (du moins dans sa forme actuelle) à qui on attribue la naissance de la cyberculture.
Lettres de créance de la presse en ligne
À l'occasion du dîner annuel de l'association des correspondants accrédités à la Maison Blanche, le président Bill Clinton laissait tomber le commentaire «Comment se fait-il que Salon Magazine n'ait pas sa table réservée?» pouvait-on lire dans le Online Journalism Review (OJR) ce 30 avril. Le président Clinton faisait allusion à la couverture en profondeur par Salon, pur produit de la presse en ligne, de l'actualité politique américaine et des nombreuses crises qui entachent son administration. Certaines révélations de Salon aurait remis en question la crédibilité d'acteurs principaux de l'affaire Whitewater et mis du plomb dans l'aile des arguments du procureur Kenneth Starr qui enquête sur de présumés conflits d'intérêt du président Clinton et de son épouse.
L'OJR trace un profil des trois journalistes affectés principalement à la couverture de l'affaire Whitewater, couverture pour laquelle Salon a essuyé les critiques du columnist Robert Novak, du Wall Street Journal, du New York Post, du Weekly Standard, du American Spectator et du Washington Times, critiques que le rédacteur en chef de Salon, David Talbot, qualifiait de «contre-attaque désespérée de l'extrême droite». Pour lui, c'est carrément une attaque de la presse traditionnelle à l'endroit de la presse en ligne.
Ne pouvant contester la véracité des informations dévoilées par les journalistes de Salon, le Wall Street Journal a versé dans le dénigrement disant qu'il ne s'agissait que d'une publication en ligne sans aucun tirage payé, soi-disant étalon de mesure du poids crédible d'un organe de la presse imprimée. Publication en ligne? C'est vrai répond Talbot, mais quand même huit millions de pages vues par mois par 500 000 lecteurs et lectrices. Talbot rejette aussi du revers de la main les propos voilés du WSJ selon lequel Salon avait des entrées privilégiées à la Maison Blanche et serait acquis aux modeleurs d'opinion de l'administration Clinton. Selon Talbot, «Nous parlons à des gens de la Maison Blanche, nous parlons à des gens de l'extérieur de la Maison Blanche [...] nous sommes des journalistes.»
Lectures rapides
En fait, non. Prenez le temps, tout votre temps, pour lire «Économie du savoir et société de l'intelligence distribuée. L'enjeu du phénomène d'Internet: produire un territoire et transformer une écologie sociale» du professeur Jean-Claude Guédon. Ce texte fait partie des études préparatoires citées dans la Politique québécoise de l'autoroute de l'information. Il y avait longtemps que Guédon nous avait fait le plaisir d'un de ses textes. Si certains se proposent d'«agir autrement», Guédon écrit autrement. On sent parfois la solitude du penseur de fond dans ses écrits. Rassurons-le, il n'est pas seul. «La thèse défendue ici indique que cette appropriation positive d'Internet ne peut se faire que par une réaffirmation profonde et vigoureuse du rôle de citoyen actif, opposé ici à celui de consommateur passif. Se servir d'Internet et surtout bien s'en servir dépend de la façon dont on arrive à tisser et à mailler la population sur des bases nouvelles.»
Dans un tout autre registre, Foglia en ligne? Eh oui, grâce au travail d'un lecteur passionné de ce chroniqueur du quotidien montréalais La Presse. C'est par pur plaisir que Jérôme Turcotte, qui ne rate rien de son chroniqueur fétiche depuis 14 ans, a mis en ligne un site bien simple, sans artifice, pour partager la prose de Pierre Foglia avec le reste de la francophilie. Selon Turcotte, «vous retrouvez dans ses chroniques des écrits sur la vie, le bonheur et le quotidien de "l'homme et de sa fiancée". Il partage avec ses lecteurs des événements reliés à certains sujets qui le passionnent comme le vélo, la lecture et son coin de pays (Estrie). Il profite également de sa tribune pour dénoncer la bêtise des hommes.» Site non commercial, fait pour le pur plaisir de son auteur et de ses lecteurs et lectrices, incontournable pour les amateurs de Foglia.
Le NetMag arts et culture Chronic'art (autrefois connu sous le nom de Tête de l'art) vient de mettre en ligne son douzième numéro. Les habitués y retrouveront des rubriques toujours aussi étoffées (cinéma, livres, musique, etc.), mais ce mois-ci portrait de Bruno Oudet, président du chapitre français de l'Internet Society (ISOC-France). Bilan de la Fête de l'Internet de mars dernier et autres perceptions intéressantes de l'Internet francophone.
Le Soleil se lève à l'est pour la sixième fois. Autre NetMag arts et culture de très belle fabrique. Nous avons particulièrement apprécié dans la galerie virtuelle la «lecture» des photos de Jean Pauly et ses manipulations numériques.
MIIM 1998
C'est du 13 au 15 mai prochains que se tiendra au Palais des Congrès de Montréal l'édition 1998 du Marché international des inforoutes et du multimédia, le MIIM. On attend cette année 300 exposants, 8000 visiteurs et 600 participants aux conférences. Signalons aussi la tenue parallèle de la Deuxième conférence internationale sur la localisation, et le Premier congrès de la Fédération internationale des associations du multimédia (FIAM).
Quelques rendez-vous à ne pas manquer. La présentation de Martin Freeth, directeur du projet Science World, sur «L'irruption de la convergence (des technologies) dans le quotidien», celle de Martine Cauvin, rapporteur du groupe de travail de la CEE sur le multimédia éducatif, sous le thème «Le marché français dans le contexte européen», et celle de Jean-Guy Rens, président de Science-Tech, intitulée «Inforoute et démocratie: le cas du Québec». M. Rens profitera de l'occasion pour livrer les grandes lignes de l'édition 1998 de son rapport de veille sur le marché des technologies de l'information au Québec, et proposera une réflexion à savoir si l'inforoute ne creuse pas davantage le clivage entre instruits et non-instruits.
En bref
Lancement cette semaine de L'Île, centre de documentation unique, offrant des informations complètes et pointues sur tous les sujets concernant les écrivains québécois et leurs oeuvres. En phase I 450 fiches bio-bibliographiques sur des écrivains québécois, en phase II, L'Île donnera accès à plus de 100 000 pages de documents d'archives, fruit de la fusion des documents du Centre de recherche en littérature québécoise (Créliq) de l'Université Laval et du Centre d'études québécoises (Cétuq) de l'Université de Montréal.
Nouveau service offert par le moteur de recherche francophone Francité, en collaboration avec la société SuperNews, un lecteur de groupes de discussion fonctionnant directement sur le Web. Ce service donne accès aux textes et images de 28 000 forums (newsgroups).
Infosuds, un MetMag publié par l'Association Informations Sud, OSBL créé à la fin de l'année 1991, après la guerre du Golfe, par un groupe en rupture avec le militantisme associatif et culturel. «Cette publication est centrée sur un dossier dont le thème est divulgué à l'avance de façon à faire participer autant de personnes que possible à son élaboration. L'approche "de proximité" est privilégiée sans que l'impasse ne soit faite ni sur les implications nationales et internationales de la question traitée, ni sur les grands dossiers internationaux».
Beau détour
Cette semaine, invitation au Cooper-Hewitt National Design Museum du Smithsonian Institution pour l'exposition virtuelle Design for Life. Trois thèmes sont explorés sous l'aspect du design : objets de la vie quotidienne, espaces et communication. Un site de réalisation élégante et fonctionnelle, où fond et forme se marient.Sur ce, nous vous souhaitons une bonne semaine à tous et à toutes,
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