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Paris, le 1er mars 2001 Divers prétextes à rumination L'actualité sollicite présentement l'esprit en tant de directions que je ne parviens pas à privilégier un thème. Je m'en propose donc plusieurs à comparer aux vôtres. Cohn-Bendit et ses remords Une première question se pose : à quel moment un menteur commence-t-il à dire la vérité et mérite-t-il d'être cru? Une deuxième s'ajoute, inspirée par le chroniqueur et essayiste Jean-Claude Guillebaud (Le Figaro, 23 février 2001) et lancée à la génération des soixante-huitards : « On a eu le courage de se livrer à une autocritique sur ses engagements idéologiques, mais cela n'a pas été le cas sur la révolution sexuelle. Ce cadavre est toujours dans le placard. » Une troisième interrogation, qui vise quelques disparus, mais aussi des personnalités toujours à l'avant-scène, découle du manifeste signé à peu près à la même époque (1977) par une belle brochette d'intellectuels. On y protestait vertement contre l'emprisonnement d'hommes condamnés pour attentat à la pudeur sur des jeunes de 12 et 13 ans : « Trois ans de prison pour des caresses et des baisers, cela suffit ». On dénonçait au passage l'incohérence de la loi : « La loi française se contredit lorsqu'elle reconnaît une capacité de discernement à un mineur de 13 ou 14 ans qu'elle peut juger et condamner, alors qu'elle lui refuse cette capacité quand il s'agit de sa vie affective et sexuelle ». Le Figaro rappelle que signaient ce sophisme des gens comme Simone de Beauvoir, Jean-Paul Sartre, Bernard Kouchner, Jack Lang, Françoise Dolto, Louis Aragon, Philippe Sollers… Étrange bouteille à la mer qu'un tel manifeste; étrange dépaysement quand le message resurgit trente ans plus tard. L'amnésie sélective est un mal répandu. Les défenseurs de la « taxe sur la mort » La surprise vient du camp des protestataires. Ils sont 120 millionnaires et milliardaires à signer dans le New York Times un plaidoyer en faveur de cet impôt! Bill Gates, par l'intermédiaire de son père, est sans doute le plus connu du grand public, mais Warren Buffet et George Soros ne font pas davantage figure d'assistés sociaux. Quel motif invoquent ces nantis pour obtenir que l'État installe un poste de péage entre la fortune d'un défunt et ses héritiers? Tout simplement, la nécessité de la philanthropie. Si les héritiers n'ont rien à craindre du fisc, ils garderont tout pour eux et n'auront aucune raison de créer une fondation à but culturel ou social. Toujours paranoïaque, j'ai peine à admirer sans réserve un tel comportement, mais j'en aime l'idée. Des Turcs derrière les Kurdes? Les déclarations de soupçons En attendant que le vrai et le faux se départagent, un élément attire l'attention. La Principauté de Monaco possède depuis peu une loi qui oblige diverses catégories d'agents financiers et de professionnels à faire des « déclarations de soupçons » sous peine d'être poursuivis. Par professionnels, entendons comptables, bijoutiers, avocats, marchands d'arts... De même que la loi québécoise oblige un médecin à signaler les traces de sévices que porterait un enfant, la loi monégasque exige que le professionnel du droit ou de la comptabilité signale à la justice ce qui répand une odeur d'argent sale. Loi stérile? demande le journaliste français. Réponse monégasque : en 2000, 210 déclarations de soupçons, 157 demandes d'enquête, 12 enclenchements de poursuite. Est-il permis de demander à nouveau - car je l'ai fait - pourquoi le Québec demande à Ottawa des changements au code criminel pour mieux lutter contre les gangs de motards, mais ne resserre pas sa propre loi sur les ordres professionnels? |
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© Laurent Laplante et les Éditions Cybérie |