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Page daccueil Les Chroniques de Cybérie
Le jeudi 3 avril 2003

Salutations à tous les Cybériens et Cybériennes!

Cette Chronique n'est optimisée ni pour Netscape, ni pour Internet Explorer, elle l'est pour ses lecteurs et lectrices.

Et aujourd'hui en Cybérie...

  Internet et le conflit : des constatations
Une nouvelle enquête du Pew Internet Project décrit l'effet qu'a eu le déclenchement officiel des hostilités en Irak sur l'utilisation d'Internet par les abonnés étasuniens au réseau.  Précisons que cette enquête a été menée aux États-Unis entre le 20 et le 25 mars 2003, auprès de 1 600 adultes âgés de 18 ans ou plus, dont 999 étaient des utilisateurs d'Internet.

Il ressort de l'enquête que 77 % des 116 millions d'utilisateurs d'Internet aux États-Unis ont eu recours au réseau pour des raisons liées au conflit, et que 14 % rapportent une utilisation accrue d'Internet, une augmentation supérieure à celle constatée après les événements du 11 septembre 2001.

La télévision demeure le médium de choix de 87 % des utilisateurs d'Internet pour s'informer sur le conflit, suivi de la radio (22 %) et des journaux (21 %); seulement 17 % rapportent s'informer principalement sur le réseau.  C'est une augmentation considérable par rapport aux 3 % qui disaient agir ainsi après le 11 septembre 2001, mais une baisse comparativement à la période «pré-guerre» quand 26 % déclarait s'informer de l'évolution de la situation principalement sur Internet.

Les auteurs du rapport constatent un clivage hommes/femmes dans l'utilisation d'Internet liée au conflit.  Les hommes sont plus susceptibles de s'abonner à des services de dépêches par courriel et de consulter le Web pour s'informer; les femmes utilisent davantage le courriel pour des chaînes de prières, pour communiquer avec des membres de leur famille ou des proches, et elles s'informent moins sur le Web.

Les blogues ne recueillent la faveur que de 4 % des personnes qui consultent le Web pour s'informer.  Les grands gagnants de la montée de l'achalandage Web sont les chaînes de télévision consultées par 32 % des utilisateurs, suivies des journaux (29 %), des sites gouvernementaux (15 %), des services de presse étrangers (10 %), des sites d'information dits «alternatifs» (8 %), des sites de groupes qui s'opposent à la guerre (6 %) et enfin des groupes pro-guerre (5 %).

Cependant, Internet aurait eu peu d'influence sur les sentiments anti et pro-guerre, du moins dans les cinq jours couverts par l'enquête, car seulement 6 % des répondants ont dit avoir changé d'opinion en raison d'informations recueillies sur Internet.  Par contre, 19 % des répondants estiment que l'information obtenue en ligne les a renforcés dans leur opinion, et 20 % qu'Internet leur a permis de s'exprimer sur la question.

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  Irak : reconstruction et enjeu des télécoms
L'issue de ce conflit n'est pas encore confirmée et l'on ignore toujours l'ampleur de la tâche de renconstruction, mais on parle déjà d'un plan de reconstruction pour l'Irak dont le coût pourrait atteindre 60 milliards de dollars US. 

Certaines sources indiquent que ce plan d'envergure sera rendu public d'ici quelques jours par le Département d'État des États-Unis et par la USAID (agence gouvernementale d'aide au développement).  Deux journalistes du quotidien écossais The Scotsman affirment avoir consulté l'ébauche de ce plan, un document de 860 pages précisant les axes de reconstruction : éducation et santé (les plus coûteux, et les premiers à être mis en oeuvre), infrastructures de transport, structures politiques.

Éducation : évaluation et remise en état de 2 500 écoles, distribution de «trousses d'écoliers» de l'USAID, dans un premier temps à 2,1 millions d'écoliers, à terme à 4,2 millions d'écoliers dans 25 000 écoles.

Santé : implantation ou reconstruction d'un centre hospitalier dans les 21 villes principales du pays; construction d'une centaine d'hôpitaux à travers le pays.  On compte, en bonne partie, sur l'embauche d'Irakiens en exil qui retourneraient au pays.

La refonte des structures politiques, y compris la division du pays en 18 régions administratives et politiques, promet d'être délicate, tout comme la construction de deux aéroports internationaux et trois consacrés à la circulation aérienne intérieure.

Tous ces projets seront menés par les États-Unis et excluent la participation des Nations Unies et de ses agences ou organismes, ce qui risque de brouiller les relations entre le président Bush et le premier ministre britannique Tony Blair.  En effet, ce dernier croit que la reconstruction de l'Irak devrait être pilotée par l'ONU, et inviter à la participation de la «communauté internationale» (ou de ce qui reste de ce concept).

Évidemment, l'enjeu est financier.  Il s'agit de savoir à qui profitera cette manne de 60 milliards de dollars, et quelles entreprises de quels pays auront accès directement ou en sous-traitance à ces marchés.

Un secteur qui n'est cependant pas abordé dans l'article du Scotsman est celui des télécommunications, peut-être parce que à cet égard on ne parlera pas à proprement parler de «reconstruction» mais bien de construction et de mise en place.

Difficile de faire un bilan des infrastructures de télécommunications en Irak.  Ce pays de 24 millions d'habitants (est. 2002) compterait environ 675 000 connexions téléphoniques selon les estimations de l'agence centrale de renseignement des É.-U.  (CIA).  Les dommages infligés lors de la première Guerre du Golfe, bien que limités, auraient été réparés, mais toute extension du réseau téléphonique aurait été freinée par l'embargo commercial qui a suivi.  L'Internet est presque inexistant.  Il y a quelques points d'accès qui sont contrôlés par les services de sécurité.  (Voir plus bas).

Comme la mise en place et le déploiement d'une infrastructure cellulaire est moins coûteuse et plus rapide qu'une infrastructure «cuivre», il y a fort à parier qu'on optera pour la première.  Or, certains politiciens exercent déjà des pressions pour que l'on adopte la norme étasunienne CDMA (accès multiple par répartition en code à large bande) au détriment de la norme européenne GSM (Groupe service mobile), pourtant plus efficace et adoptée par davantage de pays.

Darrell Issa, élu californien à la Chambre des représentants, écrivait la semaine dernière à l'administrateur adjoint de l'USAID pour lui communiquer ses préoccupations concernant le choix technologique d'un système téléphonique pour l'Irak.  Disant qu'il avait eu vent que l'on opterait pour la norme GSM, Issa affirmait : «Si la technologie européenne GSM est déployée en Irak, une partie importante du matériel requis sera fabriqué en France, en Allemagne et ailleurs en Europe du Nord et de l'Ouest.» Évitant de dire clairement qu'il ne fallait pas favoriser ceux qui avaient mis du sable dans l'engrenage de guerre devant le Conseil de sécurité de l'ONU, Issa affirmait que la norme CDMA était supérieure sur le plan technologique (un débat dans lequel nous n'entrerons pas), et que des systèmes conformes à cette norme étaient prêts à être installés par des entreprises étasuniennes.

La société à qui on attribue le développement de la norme CDMA et son perfectionnement (maintenant en 3e génération), tout comme le représentant Darrell Issa, est californienne, soit Qualcomm, qui a contribué la somme de 4 500 $ à la caisse électorale de Issa dans le cycle électoral 2001/2002.

Qualcomm n'est pas la seule ni la plus importante contributrice à la caisse de Issa.  On trouve dans la liste General Atomics, Intel, Exxon, Microsoft et autres fleurons de l'indice Fortune 500.  De plus, selon les données officielles, Qualcomm est l'une des rares entreprises à avoir contribué davantage de «soft money» aux caisses du Parti démocrate (135 000 $) qu'à celles du Parti républicain (61 000 $) pour la période visée.

Il n'en demeure pas moins que pendant que les combats font toujours rage sur le terrain, que les militaires préviennent que les combats pourrait se poursuivre jusqu'à l'été, que la télé nous montre des images d'enfants irakiens qui s'arrachent des paquets de vivres faisant partie de l'aide humanitaire qui arrive au compte-gouttes, ailleurs dans le monde on s'arrache déjà un autre pactole.

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  Irak : Internet presque inexistant
Le contexte qui prévaut dans l'ensemble du Proche et Moyen-Orient n'est pas propice au développement d'Internet.  Les conditions économiques, le rôle régulateur des États et l'éloignement des grandes dorsales de communication constituent des facteurs inhibiteurs au développement du réseau dans ces régions.  Et à ce chapitre, l'Irak se classe au dernier rang.

Avant la première Guerre du Golfe (1990), le ministère de l'Industrie avait mis sur pied un réseau national d'échange de données auquel était reliées l'Université de Bagdad et la Bibliothèque nationale.  On prévoyait à l'époque ajouter à ce réseau l'ensemble des bibliothèques irakiennes.  Il ne s'agissait pas de communications Internet du type TCP/IP, mais de simple échange de données.

Le Centre de documentation régional du Conseil de coopération du Golfe arabe s'était installé à l'université al-Mustansiriyah (Bagdad) dès 1982.  En 1989, il offrait à environ un millier d'utilisateurs un branchement commuté à son réseau et des passerelles vers la base de données Dialog et autres bases de données occidentales, sans toutefois permettre le courrier électronique.

Fait peu connu, l'Irak disposait avant 1990/1991 d'une infrastructure de fabrication de matériel informatique, modeste, mais appropriée à son marché.  On y assemblait localement des ordinateurs commercialisés sous les marques Salah al-Din et al-Waqqah, essentiellement des «clones» munis de processeurs 486 AMD ou Cyrix.

Le 2 août 1990, les bases de données occidentales interdisaient leur accès aux services irakiens; l'embargo qui a suivi la première Guerre du Golfe a rendu l'industrie d'assemblage d'ordinateurs moribonde.

L'époque post-première guerre en Irak correspond avec le déploiement tout azimut de services d'accès commerciaux dans le reste du monde (exception faite de l'Afrique).  Le suffixe .IQ, conformément aux normes ISO de désignation géographique, est attribué à l'Irak, mais on ne réserve pas de bloc de chiffres IP nécessaires à l'adressage.

En Europe et aux États-Unis, on voit paraître des sites Web qui reflètent les différentes tendances politiques et culturelles irakiennes, mais aucun site Web n'est physiquement hébergé en Irak faute de connexion.  De 1991 à 1995, le Centre de documentation régional et le ministère des Affaires étrangères militent pour un branchement au réseau.  En 1996, à Bagdad, se tient une conférence panarabe sur l'information, et des responsables gouvernementaux irakiens déclarent que l'Irak sera branché à Internet dans un proche avenir.  Cette déclaration intervient à un moment où il y a débat entre des universitaires et certains ministres à savoir si le raccord à Internet est souhaitable.  Certains y voient l'ouverture toute grande à une propagande occidentale, d'autres une ouverture nécessaire sur le monde.

En 1997, le fils aîné de Saddam Hussein, Udayy, lance un nouveau journal, le al-Zawra.  Bien qu'inféodé aux idées du régime, le journal publie dans son premier numéro un éditorial de Udayy Hussein qui constitue une critique sévère des politiques irakiennes en matière d'information, dont l'interdiction du matériel de réception de télévision par satellite, les restrictions imposées aux publications de presse étrangères, et la politique en matière d'Internet.  Il conclut en écrivant que si la situation persiste, le pays se retrouvera au niveau d'une tribu africaine.

D'ailleurs, toujours en 1997, l'Irak demande la permission au Conseil de sécurité des Nations Unies d'importer de l'Inde 1 000 ordinateurs, destinés aux secteurs de l'enseignement et du communautaire, dans le cadre du programme pétrole contre nourriture.  Après un an de tergiversations, la permission est accordée, mais à une condition : que l'on remplace dans le devis d'achat les processeurs Pentium 133 par des processeurs 486 de plus faible puissance.  On craignait que les ordinateurs servent à des fins militaires.

Lentement, le dossier Internet et son corollaire informatique évoluent.  En janvier 2000, le cabinet irakien approuve la création d'un comité chargé d'étudier les moyens de favoriser l'industrie d'assemblage informatique au pays, et ce malgré les sanctions économiques qui restreignent l'importation des composants de base.  Porosité des frontières oblige, on peut facilement trouver des ordinateurs de fabrication récente dans les boutiques irakiennes, et le gouvernement abolit les taxes sur le matériel informatique.  On procède discrètement au raccordement à des dorsales par fibre optique (dont l'importation est interdite en vertu de l'embargo) avec des pays voisins, en plus d'exploiter des liaisons satellites, et le gouvernement ouvre plus d'une vingtaine de centres d'accès Internet publics.

L'accès dans ces centres se fait cependant sous haute surveillance de l'État, et comporte des frais élevés compte tenu du revenu moyen des Irakiens.  D'une part, l'accès à des comptes de courriel Web comme Hotmail ou Yahoo! sont interdits, et les postes de travail sont munis de filtres interdisant l'accès à certains sites Web.  Des surveillants, préfets de discipline modernes, arpentent en permanence les centres d'accès Internet pour contrôler les fins auxquelles sont utilisés les postes de travail..

La consultation du Web coûte environ 1 euro l'heure (1,50 $ CDN).  Chaque courriel coûte environ 0,12 euro (environ 0,20 $ CDN), mais on peut s'abonner au service de courriel gouvernemental pour 50 euros par année (environ 75 $ CDN).  Le salaire moyen d'un fonctionnaire ou d'un enseignant étant d'environ 5 euros par mois, on comprendra qu'Internet n'est pas à la portée de toutes les bourses.

Il est difficile d'évaluer ce qui restera de cette infrastructure naissante d'Internet en Irak quand les canons se seront tus, mais on imagine les équipementiers U.S.  se frotter les mains à la perspective de participer à sa reconstruction.

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  Irak : nouvelles du front des blogues
Will Vehrs, auteur du très populaire Punditwatch, jette l'éponge.  On sait qu'aux États-Unis, les grandes chaînes de télévision diffusent le dimanche matin des émissions d'affaires publiques au cours desquelles on interviewe politiciens et personnes d'influence, sorte de grand-messe dominicale des infophages.  Chaque semaine, Vehrs nous proposait sur son blogue un résumé de ce qui avait été dit lors de ces entrevues, et résumait également les commentaires des animateurs, intervieweurs et commentateurs.  Exaspéré comme on peut souvent l'être des commentaires émis par les soi-disant spécialistes des médias, Vehrs a pété les plombs dimanche dernier : «Punditwatch ne tentera pas de donner un sens aux théories et aux opinions éthériques des commentateurs jusqu'à ce que suffisamment de temps passe pour que l'on se fasse une opinion informée.  Je fais confiance à David Brooks et Mark Shields [Ndlr.  Deux commentateurs réguliers à ces émissions du dimanche.] pour me faire part des tractations dans l'arène politique, mais non pour me dire où on en est avec une guerre après seulement dix jours.  Punditwatch reviendra quand le «brouillard de la guerre» (fog of war) sera dissipé.  Vehrs faisait allusion, entre autres, à un article de Brooks publié le 30 septembre 2002 dans l'hebdomadaire de droite Weekly Standard dans lequel il accusait la gauche pro-paix de se complaire dans le brouillard de la paix (fog of peace).

En passant, l'expression «brouillard de la guerre» remonte aux campagnes napoléoniennes où l'utilisation de canons à poudre noire provoquait d'épais nuages de fumée opaque qui obscurcissaient la vue.  L'expression fut reprise par l'analyste militaire prusse Carl von Clausewitz il y a environ 171 ans, et servit à décrire la difficulté, en période de conflit, d'avoir accès à une information sûre et de discerner le vrai du faux.  Clausewitz écrivait que les combats sur le terrain se déroulaient dans une sorte de clair-obscur qui, comme le brouillard et le clair de lune, font paraître certains objets plus gros qu'ils ne sont.

Depuis le 19 mars, SiliconValley.Com diffuse le War Watch Weblog sous la direction de John Murrell et John Paczkowski, deux journalistes de longue date de la publication.  Des propos mesurés, parfois cyniques, sur le conflit.  Comme cette mention du novlang de Donald Rumsfeld, secrétaire d'État à la Défense, qui en point de presse n'était pas certain d'un élément de réponse et à demandé au général Richard Myers, chef de l'État major, de le «calibrer» sur le sujet.

Le quotidien USA Today a emboîté le pas aux autres grands médias depuis quelques jours en publiant son blogue de guerre, Iraq War Blog, sous la direction de Angela Gunn.  Mis à part l'aptonyme, Angela Gunn possède une longue expérience du Web, ayant contribué au lancement du magazine Yahoo! Internet Life dès 1995, et écrit dans de nombreuses autres publications comme Windows Magazine, Family PC, Internret World et The Industry Standard, sans oublier ses chroniques sur l'éthique Web dans le projet Consumer Web Watch.  Elle continue parallèlement à alimenter quotidiennement son blogue personnel.

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  Expliquer la guerre aux enfants
Certains adultes ont parfois du mal à comprendre ce qui se passe sur les champs de bataille.  Ceux et celles d'entre vous qui ont des contacts soutenus avec des enfants, les vôtres ou ceux des autres, ont parfois à répondre à leurs questions concernant cette guerre.  Que dire? Comment expliquer? Surtout qu'il est presque impossible de les isoler du flot continu d'informations et d'images qui envahissent, avec un tel sentiment d'urgence et à toute heure, les écrans de télévision.

Deux ressources pour les adultes (parents, enseignants, intervenants en service de garde, etc.) confrontés aux angoisses et aux questions des enfants relatives à la guerre.

Le Centre de ressources en éducation aux médias (CREM) publie un texte de Marie-Claude Coppex-Mudry intitulé «L'éducation aux médias, une protection contre les blessures médiatiques».  Reconnaissant la fascination des enfants pour la télévision et l'audiovisuel et la place prépondérante de la télévision parmi les sources d'information, l'auteure soutient que l'interdiction des scènes de violence ne serait qu'une protection passive.

Elle rappelle que les actualités présentent un spectacle du monde peu rassurant pour les jeunes et qu'elles peuvent avoir des conséquences sur leur développement : «Des récits dramatiques vous parviennent de partout dans le monde.  Il s'agit d'attaques imprévisibles au cœur d'une ville, de catastrophes naturelles, de famines ou d'épidémies incontrôlables, qui toutes déciment les populations.  Rappelez-vous le sentiment d'impuissance qui vous habite à cet âge-là.  Vous espérez que vos parents vous protègent contre tous ces dangers.  Mais vous les percevez aussi impuissants que vous.  Le monde des adultes vers lequel vous vous dirigez vous semble hostile.  Il vous fait peur, vous inquiète.  Vous aimeriez pouvoir retarder le moment d'y pénétrer.»

Trois stratégies actives sont proposées : encourager l'expression des émotions, décoder les messages reçus par une éducation aux médias, et s'investir dans une action personnelle ou collective.  À cet égard, les chercheurs la préconisent sous forme d'activités bénévoles dans l'environnement immédiat de l'enfant pour habituer le jeune à répondre aux agressions de la vie non par la passivité mais par l'engagement personnel, forme d'éducation à la solidarité humaine.

Pour sa part, le Réseau Éducation-Médias y va de plusieurs textes, dont la Fiche-conseils à l'intention des parents.  On y suggère de superviser l'accès aux médias, d'interpréter messages et images, et d'atténuer l'impact des médias.

Entre autres, il s'agit de ne pas présumer que les enfants ignorent les événements de l'actualité, d'être attentifs aux signes d'anxiété, de prendre le temps de les écouter et d'échanger avec eux.  On suggère aussi l'action personnelle ou collective : «Gandhi disait : “Soyez acteur des changements que vous souhaitez voir dans le monde.” Aider les autres, dans votre communauté ou ailleurs, peut contribuer à apaiser vos sentiments de détresse et d'impuissance.»

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  Le cas unique de Tim Johnson
On sait qu'aux États-Unis, les deux tiers des élus au Congrès ne possèdent pas de passeport, ce qui implique qu'ils ne sont jamais sortis du pays, et sont donc peu exposés aux autres réalités et cultures du monde.  Certains observateurs, expliquant ceci par cela, y voient l'un des facteurs qui contribuent à une nation repliée sur ses valeurs et peu perméable aux influences externes.

Une autre particularité des élus étasuniens est illustrée par le cas unique de Tim Johnson, sénateur démocrate du Dakota Sud.  En effet, Johnson est le seul sénateur à avoir un enfant qui sert sous les drapeaux.  Et pas de traitement de faveur pour Brooks Johnson, fils de sénateur et membre de la célèbre 101e aéroportée, il en est à sa quatrième campagne en cinq ans ayant servi en Bosnie, au Kosovo, en Afghanistan et maintenant en Irak.

Les législateurs de Washington seraient-ils moins va-t-en guerre si un plus grand nombre d'entre eux avaient des enfants au service militaire? La question reste ouverte.

À une époque où le service militaire était obligatoire aux États-Unis, c'était un honneur pour les familles politiciennes ou de la grande société de voir leur progéniture s'illustrer au combat.  Le cas le plus célèbre est certainement celui de John F.  Kennedy qui, au cours de la Seconde Guerre guerre mondiale, commandait le patrouilleur/torpilleur PT-109.  Le 2 août 1943, le PT-109 était éperonné par le destroyer japonais Amagiri.  Kennedy parvint quand même à rejoindre avec son équipage une petite île déserte d'où ils furent rescapés quelques jours plus tard.

En 1973, après la Guerre du Viêtnam, le gouvernement des États-Unis abolit le service militaire obligatoire.  Certains chercheurs estiment que depuis, la composition des forces armées, formées uniquement de volontaires, est très différente et n'est plus un reflet de la nation sur le plan démographique.

D'ailleurs, dans les semaines qui ont précédé le déclenchement officiel de la campagne d'Irak, le représentant Charles Rangel (Démocrate, New York) qui s'était prononcé contre l'intervention armée en étonnait plusieurs en appelant à un retour au service militaire obligatoire.  Le propos illustrait bien la situation : «Il est injuste que les citoyens à qui on demande de faire nos guerres soient des enrôlés qui ont joint les forces armées à cause de conditions économiques, parce qu'ils n'avaient pas d'autre choix.» La Maison Blanche a vite fait de rejeter les propositions de Rangel.

Le New York Times (inscription sans frais requise) publiait dimanche dernier le sommaire d'une étude réalisée par Richard Kolb, rédacteur en chef de la revue «Veterans of Foreign Wars Magazine» (Anciens combattants des guerres à l'étranger), texte qui sera publié dans le numéro d'avril de VFWM.  En se basant sur les données du ministère de la Défense, Kolb arrive à des constatations révélatrices sur l'évolution de la composition du corps militaire.

Par exemple, bien que les citoyens de race noire ne représentent que 12,7 % de la population, les enrôlés de race noire constituent 22 % de l'effectif militaire; parmi les enrôlés de sexe féminin, 35 % sont de race noire, chiffre qui grimpe à 50 % si on ne tient compte que de l'armée de terre.  De plus, elles demeurent plus longtemps sous les drapeaux que les enrôlées de race blanche.

Bien que l'effectif militaire total ait été réduit de 23 % depuis dix ans, le nombre d'enrôlés d'origine hispanique est passé de 90 600 à 118 000 au cours de la même période, une hausse d'environ 30 %.  De plus, on accélérerait le traitement des demandes de citoyenneté de plus de 30 000 latino-américains qui ont un statut de résidents, mais pas de citoyens des États-Unis et qui font néanmoins partie du contingent armé déployé en Irak.

Les «nouveaux combattants» posséderaient une scolarité plus élevée que l'ancienne garde constate cependant Richard Kolb.  Ceci s'explique par le fait que les étudiants universitaires pouvaient bénéficier d'une dispense du service militaire obligatoire, et que les enrôlés ont maintenant droit à des programmes d'enseignement général et spécialisé durant leur service.

On perçoit toutefois certains facteurs de ségrégation au sein des forces armées.  Bien que noirs et blancs cherchent, dans une proportion quasi égale, à obtenir des spécialisations en communications, en renseignement ou en services médicaux, les enrôlés de race noire sont deux fois plus présents dans les fonctions administratives et de soutien, et ceux de race blanche en proportion supérieure dans l'infanterie, l'artillerie et leurs équivalents navals.  On trouve aussi, dans l'armée de l'air, très peu de pilotes de race noire ou d'origine hispanique, les escadrilles représentant l'élite du système militaire.

Les résultats de l'étude de Kolb soulèvent deux questions.  D'une part, assiste-t-on à l'émergence d'une «classe guerrière» dans la société étasunienne, une classe déterminée par ses propres caractéristiques démographiques et économiques? D'autre part, les élites devraient-elles contribuer davantage à la constitution de l'effectif militaire?

Sur ce dernier point, le professeur de sociologie Charles Moskos de l'Université Northwestern et partisan du service militaire obligatoire estime que la population accepterait mal des pertes élevées lors d'un conflit, à moins que le fardeau ne soit distribué plus équitablement entre les différentes couches de la société, et rappelant qu'Agamemnon était prêt à sacrifier sa fille Iphigénie...

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  Et ailleurs sur le web : Radio-Canada blogue «Techno»; du nouveau sur le net des études françaises; le retour de Davduf et le Blogue du Menteur; le retour annoncé de «Transfert»?
Bruno Guglielminetti, l'animateur des capsules «Techno» diffusées à la Première chaîne de Radio-Canada, a lancé le «Carnet Techno» sur le site Web de la radio publique.  On y trouve plusieurs ajouts quotidiens de brèves technologiques, ainsi que les fichiers audio des entrevues que mène régulièrement l'animateur des émissions.  Il s'agirait d'une première canadienne francophone pour un média traditionnel d'accueillir sur son site un blogue d'un de ses artisans.

Marie Lebert nous informait il y a quelques jours de la mise en ligne sur le site du «Net des études françaises» de deux publications.  La première, le «Dictionnaire du NEF 2003» contient 450 termes et sigles.  On précise : «Il s'agit d'un dictionnaire francophone (la Francophonie comportant à ce jour plus de cinquante pays), et non franco-français, franco-québécois, franco-belge, franco-suisse, etc.».  La seconde traite du livre numérique, «Le Livre 010101 (1998-2003)» qui fait suite à l'ouvrage décrivant la progression de ce médium méconnu pour la période 1995/1998. 

Soulignons le retour du rafaleur David Dufresne (Davduf.Net) qui, après des mois de silence sur le Web, a lancé il y a quelques semaines un «blog farouchement indépendant [en pleine construction], carnet de bord d'un mutant perdu dans un monde en ruines.» Puis, l'arrivée du «Blog du Menteur» de Pierre Lazuly, qui vient compléter ses Chroniques, ainsi que la revue de presse quotidienne de «L'Autre portail».

La publication en ligne «Transfert» sera-t-elle bientôt de retour? En mai 2002, nous déplorions la disparition du magazine et de son site Web et citions son directeur Christophe Agnus : «Depuis 1998, Transfert a déjà été enterré plusieurs fois.  Or, même s'il n'est pas dans une forme olympique, pour un mort, il est en pleine forme.  Et tant qu'il y a de la vie...».  Or, depuis quelques jours, on peut lire ce message laconique mais prometteur son site : «Transfert revient...  Plus que quelques jours de patience!» Et on s'en réjouira.

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Et sur ce, meilleures salutations à tous et toutes.

Site personnel de Jean-Pierre Cloutier

Collaboration à la recherche : Mychelle Tremblay

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