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Les Chroniques de Cybérie
Chronique du 14 juillet 1998

© Les Éditions Cybérie inc.

Le 14 juillet 1998.

Salutations à tous les Cybériens et Cybériennes!

Cette Chronique n'est optimisée ni pour Netscape, ni pour Internet Explorer, elle l'est pour ses lecteurs et lectrices.

Cette semaine...

Un tribunal canadien force l'identification d'utilisateurs
ÉconoMédia doublement orphelin
Réalisme financier
Dossier pub : formule portail remise en question, bilan en France
Clientèle des réseaux : on révise les chiffres
La nouvelle économie a son magazine
Courrier électronique, courrier de seconde classe?
Miroir, miroir, dis-moi...
Webmestres, un marché lucratif
Dur dur d'être un bébé
Dur dur d'être arrêté
Beau détour

 Un tribunal canadien force l'identification d'utilisateurs
Voilà une cause qui aura de nombreuses répercussions sur le respect de la vie privée sur le réseau.  Une entreprise de recyclage de déchets industriels implantée à Hamilton (Ontario), Philip Services, a obtenu d'un tribunal de première instance le dévoilement de l'identité d'abonnés par les fournisseurs de services de ces personnes, dont Yahoo!, AOL, sa filiale CompuServe, iStar Internet, Weslink, et PsiNet.  En tout, douze ordonnances du tribunal (exemple) ont été signifiées reposant sur des adresses IP fournies à partir du fichier journal d'un forum d'échange sur les entreprises hébergé par Yahoo!.

C'est que Philip Services a prétendu que des menaces avaient été proférées à l'endroit de certains membres de son personnel sur le forum Yahoo! Philip Services, selon certains des messages (depuis retirés du forum), se serait rendue coupable de malversations en bourse de nature à porter préjudice aux investisseurs.  Inquiétude légitime de Philip Services pour la sécurité de ses employés? Tentative à peine voilée de faire taire ses critiques qui exposent des recours collectifs et dénoncent ses méthodes de gestion? Difficile à dire.

Ce qui inquiète dans l'affaire c'est que le jugement a été rendu ex parte, sans la présence de procureurs représentant les fournisseurs d'accès Internet.  De plus, les ordonnances portent sur les noms, adresses, numéros de téléphone des abonnés, mais aussi sur l'ensemble de leurs communications électroniques effectuées par l'entremise de leurs fournisseurs.

Une des personnes identifiées comme auteur de messages critiques à l'endroit de Philip Services est John Gallagher, ex conseiller municipal à Hamilton, qui se déclare disposé à se défendre de tout geste présumé illégal.  Les intentions de Philip Services ne sont pas d'ailleurs très claires quant à l'utilisation des renseignements obtenus grâce aux ordonnances du tribunal.

Le président de Frontière électronique du Canada (EFC), David Jones, s'est dit renversé par ces ordonnances, mais aussi par la complaisance des fournisseurs à fournir des renseignements d'une aussi large portée.  Selon Jones, cette histoire aura d'énormes conséquences sur la notion de confidentialité sur le réseau et de confiance envers les fournisseurs.  Archives média d'EFC pour la suite des événements.

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 ÉconoMédia doublement orphelin
Après le départ, le 1er juin, de Mario Pelletier de la firme Imaginor, c'est au tour de Renato Cudicio de tirer sa révérence et de quitter le netmag ÉconoMédia qu'il avait fondé avec Pelletier en février 1998.  Dans un communiqué, Cudicio évoque des «divergences de vues avec le nouvel éditeur [Netgraphe, NDLR.] sur les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs visés» ajoutant que «la nouvelle direction n'a pas démontré une ferme volonté de développer ÉconoMédia et de fournir un contenu rédactionnel objectif et de qualité».

La nouvelle est tombée au lendemain du lancement de la nouvelle formule intégrative de La Toile du Québec, aussi éditée par Netgraphe, où Économédia constituait le maillon économie des «chaînes» d'information proposées par l'éditeur.  Selon un autre netmag édité par Netgraphe, Multimédium, «on n'est pas étonné par ce départ puisque Renato Cudicio réclamait 150 000 dollars par année pour continuer à alimenter le site en nouvelles en engageant deux collaborateurs.  La rentabilisation d'un tel budget par la publicité nécessiterait au moins 17 000 visites par jour dans un marché mature (ce qui n'est pas le cas). L'entente était donc impossible.»

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 Réalisme financier
Michael Wolff a été un des premiers journalistes spécialisé en NTIC à vouloir muter en entrepreneur.  En 1993, son livre NetGuide était une des premières cartes routières en imprimé du cyberespace.  Le précurseur n'a cependant pu retirer tous les bénéfices de son travail précoce; bien au fait de la cyberculture, il connaissait mal le milieu des affaires.

Ce qui contribuera certainement à irriguer son compte en banque, Wolff vient de publier un récit de ses déboires commerciaux sous le titre «Burn Rate : How I Survived the Gold Rush Years on the Internet».  Wolff y décrit avec humour et satire une industrie de l'Internet où l'élite des investisseurs fait des pieds et des mains pour investir dans des entreprises spécialisées en déficits.  Ce qui s'achète et se vend, selon Wolff, ce n'est pas de la technologie, du contenu ou voire même des concepts.  C'est la possibilité d'être partie prenante à quelque chose de très «cool» qui pourra être revendu un jour à quelqu'un d'autre, malgré les déficits.  écrit avec une bonne dose d'humour, le livre de Wolff permet aussi un survol d'autres entreprises de la première heure où bien souvent l'improvisation se substituait au véritable talent.  Un livre qui marquera.

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 Dossier pub : formule portail remise en question, bilan en France
Cette semaine se déroule à Chicago la conférence Internet World, édition été 1998, où l'analyste principal de la firme Forrester Research, John Nail, a prédit un sombre avenir pour les agrégateurs de contenus et les tenants de la formule des portails tel que le rapporte News.Com.  Selon Nail, ces formules reposent sur de fausses prémisses quant au rôle et à la valeur de la publicité sur Internet.  En raison de la nature intrinsèque du médium qui permet la communication directe entreprise/client, il constate un passage du modèle «acquisition de client» à un nouveau paradigme basé sur le marketing relationnel et la fidélisation de la clientèle.  Dans un tel scénario, la publicité et l'agrégation de contenus qu'elle soutient, sans pour autant disparaître, seront reléguées au second plan.

Nail décrit le concept de «prime de portée» à l'avantage des entreprises média, soit la différence entre le pourcentage du total des recettes publicitaires qu'un diffuseur de contenu s'assure comparativement au pourcentage du bassin total de clientèle qu'elle rejoint.  En télévision, les six plus grands réseaux s'accaparent 84 % des dépenses publicitaires même s'ils n'atteignent que 67 % de la clientèle potentielle (prime de 25 %).  Dans l'imprimé, il cite People et TV Guide qui obtiennent 8,9 % des recettes publicitaires en échange de 7,3 % de part de marché (prime de 22 %).

Sur le Web, les neuf formules portail qui semblent fonctionner (pour le moment) monopolisent 59 % des recettes publicitaires mais n'offrent en retour que 15 % des pages vues, une prime de portée de 293 %.  Nail prédit l'effondrement à terme de ce ratio.

Par ailleurs, on apprenait cette semaine dans le netmag Bénéfice.Net les résultats d'une étude menée par la société Stratégie Internet sur le marché de la publicité en ligne en France.  Deux cents annonceurs ont réalisé des campagnes en ligne, les dépenses devraient atteindre 70 millions de francs (environ 18 millions de dollars canadiens) en 1998.  Sauf pour un première campagne qui se limite souvent à un seul support, les annonceurs choisiraient au moins trois sites pour leur campagne.  On semble satisfait des résultats chez les annonceurs.  Près de 40% des sociétés ont enregistré une augmentation significative de trafic sur leur site, le plus souvent supérieure à 50% et 83% des annonceurs se disent satisfaits par leur expérience de publicité en ligne. 

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 Clientèle des réseaux : on révise les chiffres
Après la révision à la baisse du volume de dépenses publicitaires sur le Web évoqué la semaine dernière, c'est au tour des estimations du nombre de personnes branchées à Internet d'être revues et corrigées.  S'éloignant des tendances inflationnistes, eMarketer, firme spécialisée dans les analyses et études de marketing, estime qu'il y a 36 millions de branchés à travers le monde, dont 24 millions aux états-Unis, soit les deux tiers.

Ces chiffres détonnent avec ceux avancés dans d'autres enquêtes et sondages où on fait état de 129,5 millions de personnes sur la planète branchées à Internet.  Pourquoi ces écarts? Selon Geoffrey Ramsay, chef statisticien chez eMarketer, c'est que l'approche retenue par cette firme est plus objective et repose sur des critères plus sévères de ce que constitue une personne branchée.

Ainsi, eMarketer ne recense que les «vrais utilisateurs», soit ceux et celles qui se branchent au moins une ou deux fois par semaine pour des périodes d'une ou deux heures.  La méthode exclut donc les personnes s'étant déjà branchées à quelques occasions en dilettantes (le dabbler factor) et les décrocheurs du réseau (oui, il y en a) qui se sont abonnées à un service d'accès mais qui y ont ensuite renoncé par manque d'intérêt.  eMarketer affirme qu'aux états-Unis seulement, 28 % des utilisateurs présents sur le réseau en 1997 n'y sont plus en 1998.  Effet dégrisant pour certains, mais eMarketer n'en prévoit pas moins une forte hausse de la clientèle des réseaux.  Toujours pour les états-Unis, chaque minute voit arriver 36 nouveaux utilisateurs, soit 52 000 par jour, 365 000 par semaine, 1,58 million chaque mois. 

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 La nouvelle économie a son magazine
Lancement récent en kiosque d'un nouveau magazine sur la nouvelle économie, Business 2.0.  Tout à fait dans la ligne de ce mouvement qui avait déjà son manifeste signé en septembre dernier par Kevin Kelly de la revue Wired, et son encyclopédie publiée en trois feuillets ce printemps, aussi par Wired, Business 2.0 entend cerner ce que l'on entend par l'expression nouvelle économie, décrire les règles de ce mouvement, en présenter les principaux acteurs.

Le site Web est encore assez mince, on nous dit attendre la sortie du deuxième numéro pour verser sur Web le contenu du premier.  à preuve que certains principes de l'«ancienne économie» tiennent toujours, comme ne pas nuire aux ventes du papier en étant trop généreux sur les contenus écran.

Autre principe qui semble tenir bon, celui de la représentation sociodémographique de «ceux qui comptent».  Dans un article présentant les 25 personnes que l'on estime être vraiment importantes dans la nouvelle économie, seulement deux femmes (l'avocate Christine Varney et la professeure Pamela Samuelson de l'université Berkeley), un noir (Larry Irving, secrétaire américain adjoint au Commerce en matière de communications et d'information), deux non américains (Mahatir bin Mohamed, premier ministre de Malaisie et Muhammad Yunus, directeur de la Grameen Bank du Bangladesh).  Pas d'Européen, pas d'hispanophone, pas de francophone.

Nouvelle économie et mondialisation, vous dites?

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 Courrier électronique, courrier de seconde classe?
C'est bien ce qu'on a tous senti un jour alors qu'un message envoyé à une grande entreprise, un organisme important ou un ministère est resté sans réponse.  J'avoue m'être rendu coupable de cette faute à l'occasion.  On lisait dans le service nouvelles du New York Times des chiffres désolants sur la manière dont les grandes sociétés traitent la messagerie électronique.  Une d'entre elles a reçu en un mois 264 000 appels téléphoniques à son centre de service à la clientèle et dit avoir répondu avec satisfaction a 225 000 de ces appels.  Au cours de la même période, elle a reçu 20 000 messages par courrier électronique, mais n'a su répondre qu'à 2 000 d'entre eux.

Selon Donna Hoffman, professeure associée à l'école de gestion de l'Université Vanderbilt, les entreprises qui affichent leur présence sur le Web sont débordées de messages, mais peu estiment qu'y répondre constitue un des plus importants volets du service à leur clientèle, et peu disposent de politiques à cet égard ou y affectent les ressources nécessaires.

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 Miroir, miroir, dis-moi...
Si vous croyez que les sites miroirs sont de fidèles répliques de l'original, détrompez-vous, surtout s'il s'agit du populaire moteur de recherche AltaVista.  C'est la conclusion à laquelle en arrive Olivier Andrieu, auteur chez Eyrolles du livre «Trouver l'info sur l'Internet» (téléchargement sans frais en format PDF du chapitre sur AltaVista).  Andrieu a mis au banc d'essai le site original logé chez Digital à Palo Alto (Californie), puis les versions miroirs Asie, Australie, Amérique latine, Europe du Nord et Canada d'AltaVista.  L'essai a été effectué avec cinq noms propres, cinq noms communs en anglais et cinq noms communs en français afin de comparer les résultats des requêtes de recherche.

On constate de sérieux écarts entre les résultats sur les différents sites d'AltaVista, même en effectuant des recherches identiques.  Selon Andrieu, «Il est clair que les sites miroirs d'AltaVista ne sont donc pas tous égaux devant l'internaute».  Explication? De toute évidence, les sites miroirs ne disposent pas de la même base de données que le site original.  En outre, il y aurait une montée en puissance technique des moyens de stockage du site californien et un décalage dans le temps avec ses miroirs sur ce point.  Sa suggestion : continuer à toujours interroger la même base, soit celle qui semble a priori la plus à jour, celle de Palo Alto.

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 Webmestres, un marché lucratif
Mine de rien, les responsables des sites Web d'entreprises engagées dans le commerce électronique avec le grand public représenteront un marché de 1,2 milliard de dollars en 1998, somme qui devrait tripler en 1999.  C'est du moins ce qu'affirme ActivMedia dans son rapport «Selling to consumer Website Managers» qui fait état d'un marché vorace chez les webmestres.  Et sur quoi repose ce marché? Principalement de produits et services destinés à assurer le volet transactionnel sécuritaire des sites Web commerciaux, mais aussi des logiciels d'édition et de gestion de sites, des services d'hébergement, et autres éléments essentiels du commerce électronique de détail, le B-2-C (business to consumers).

L'émergence de ce nouveau marché n'est certainement pas étrangère à la création d'un nouveau site destiné aux concepteurs et réalisateurs de sites Web, Anchor.  Si d'autres sites occupent déjà le créneau, comme l'excellent WebMonkey des entreprises Wired ou Builder de C|Net, Anchor se distingue par une approche plus globale à la conception de sites.  Sans négliger les conseils et astuces techniques, Anchor aborde d'autres thèmes comme récemment la planification d'une production Web, les leçons à tirer du phénomène cybersexe, l'extinction éventuelle de la race webmestre et son remplacement par le concept d'équipe.  On trouvera aussi une sélection des meilleurs sites s'adressant aux webmestres et un forum de discussion.  Excellent ajout au corpus des ressources disponibles en ligne.

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 Dur dur d'être un bébé
«Il s'agit là d'une des histoires les plus méconnues de notre temps» affirme Carol Bellamy, directeur général de l'UNICEF.  Bellamy évoquait un des points saillants du rapport Le progrès des nations 1998 sur la manière dont les nations améliorent (ou disent tenter d'améliorer) effectivement le statut de leurs enfants.  Selon ce rapport, une naissance sur trois n'est pas enregistrée, soit quelque 40 millions d'enfants qui sont privés chaque année de nom officiel ou de nationalité.  Vingt deux pays ne possèdent pas de données sur l'enregistrement des naissances.  «L'absence d'un certificat de naissance valide constitue une menace fondamentale pour un enfant, car il décide de l'accès aux soins de santé, à la vaccination, à l'éducation.  Faute de ce document, il n'est pas possible non plus à un enfant de prouver qu'il est trop jeune pour être appelé sous les drapeaux, ou pour travailler dans une usine.» Dérangeant.

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 Dur dur d'être arrêté
L'organisme Human Rights Watch dans un rapport de 450 pages publié la semaine dernière (version disponible en français) met en cause l'impunité dont jouissent les auteurs de brutalités policières aux états-Unis.  «Coups de feu tirés sans raison valable, passages à tabac, morts par étranglement et autres formes de mauvais traitements corporels, telles sont les exactions qui ont été dénoncées dans de nombreuses villes [...] Les informations relatives aux exactions policières sont très difficiles à obtenir.  Les unités chargées des affaires internes opèrent sous le voile du secret [...] Au cours de l'année budgétaire 1996 par exemple, sur un total de 11 721 plaintes reçues par la Division des Droits Civils du Ministère de la Justice, seuls trente-sept affaires impliquant des membres des forces de l'ordre ont abouti devant un grand jury».  Allons, circulez, y'a rien à voir ici...

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 Beau détour
Cette semaine, Welcome to Horvatland, une rétrospective de cinquante ans de photographie par Frank Horvat.  Pour une fois, un site graphiquement lourd mais qui vaut bien le téléchargement complet.

Sur ce, compliments à l'équipe de France pour sa victoire au Mondial, triomphe presque prévu par Pierre Foglia le mois dernier, bien qu'il se soit planté sur l'Argentine comme équipe finaliste.  Une heureuse fête nationale à tous nos lecteurs et lectrices de France en ce 14 juillet.  Et aussi, un heureux 80e anniversaire de naissance à Nelson Mandela ce 18 juillet.

Et sur ce, nous vous souhaitons une bonne semaine à tous et à toutes.

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Écrire à Jean-Pierre Cloutier


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